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Le prince et Marguerite

 Difficulté **

Profondeur **

Originalité ****

Emotions ***

Ce livre possède plusieurs points communs avec « Catch22 »: peu connu en France, il est révéré dans le monde  (vendu à plus de 100 millions d'exemplaires), il traite aussi la violence sur un mode satirique qui divertit le lecteur et le laisse perplexe quant à sa propre méchanceté, et enfin il transmet un message fort sur l’absurdité d’un monde autoritaire : communiste ici, militaire dans « Catch22 ». 

La plume ironique et le ton facétieux viennent rythmer une histoire sanglante, délirante et troublante. L’âme russe, incarnation parfaite de cette ambiance, exsude de tous les personnages : superstitieuse, servile parfois, rebelle un peu, résiliente, fière, extrême dans ses émotions et ses actes. 

La folie fait bien partie intégrante des personnages, avec toute sa palette : manies ordinaires, traumatismes structurels, angoisse justifiée mais inimaginable, … De fait les fous de l’asile, lieu récurrent du récit, ressemblent plus aux gens de l’extérieur qu’à leurs voisins de chambre. On pense alors à Wilde, Tchekhov, voire Sartre, dramaturges de l’absurde.

Satan apparaît ici dans une version hollywoodienne (spectaculaire, violent et cruel) très moderne, comme une allégorie de Staline. Les conséquences de son séjour à Moscou sont majeures et aucun personnage n’en sort indemne. L’œuvre appartient donc au fantastique comme Shelley, Poe ou Swift dans la BE. 

Boulgakov convoque avec les servants du diable à la fois les créatures infernales de Dante mais aussi les monstres irréels de Lewis Caroll. De cette façon, il maintient toujours son récit sur la crête entre conte de fées et mysticisme horrifique.


Il passe ainsi discrètement son message de révolte contre le système communiste qui le menace, préfigurant ainsi Kafka, Orwell et Huxley dans l’allégorie, puis son compatriote Soljenitsyne dans la description documentaliste. 


Une œuvre étonnante, moderne et drôle, qui représente à mon humble avis un excellent passeur vers Kafka, Gogol ou Dostoïevski.

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