Flaubert
Difficulté ***
Profondeur ***
Originalité ***
Emotions ***
""Flaubert était le style" selon Maupassant qui finira par l’assister dans ses recherches littéraires. Il est une référence pour Henry James et James Joyce, deux plumes exceptionnelles.
L’exigence mise par Flaubert dans la précision des mots est devenue célèbre. Baudelaire l'avait exprimé en disant de ce roman qu'il était la description parfaite d'un sujet rebattu. Les descriptions exhaustives et les digressions hallucinantes emmènent en effet le lecteur dans un réalisme hypnotique, qui transmet bien l’ennui des personnages ! L’équilibre des expressions et la pureté du style restent les piliers d’une plume unique.
Pour beaucoup "Mme Bovary" est une œuvre froide emplie de personnages médiocres et immoraux. Si certains caractères sont irrécupérables, notamment les parents de Charles, ainsi que les gens de pouvoir et d'argent, les personnages principaux ont tous leurs moments d’humanité : le curé, le pharmacien, le père d’Emma et surtout l’héroïne et ses amants. Car Charles est émouvant, Léon et Rodolphe (et Justin) restent des amoureux, certes imparfaits. Enfin Emma, d’un égoïsme rare et d’une passion infantile, nous touche pourtant par sa naïveté, son romantisme, son énergie et sa liberté.
Contrairement aux dires de Baudelaire, le succès et la pérennité de "Mme Bovary" ont pour origine son sujet plus que son style. C’est l’adultère comme le nommait le poète qui a d’abord généré l’attention, puis la censure et enfin cette héroïne féminine, frustrée par la société, forte et passionnée. Les autres œuvres de Flaubert, plus originales ("Salambo") ou plus sociales ("Bouvard et Pécuchet") n’ont d’ailleurs pas atteint le statut de celle-ci. Car "Mme bovary", indépassable par le style, critique d’un monde passé, demeure une référence absolue de la liberté de la femme.
Ce destin tragique d’une femme esseulée semble aujourd’hui paré d'émotions un peu immatures et exagérées, mais celles-ci animent la dramaturgie de cette existence triste et terrible. L’œuvre met en avant pour la première fois dans la littérature française une femme indépendante dans son rapport à la vie, réaliste et touchante.
"Mme Bovary c'est moi" : cette phrase attribuée à l’auteur a deux origines contradictoires. Selon Baudelaire, la force et l'intrépidité d’Emma lui donnent un caractère masculin inconsciemment transmis par l’auteur. À l’inverse, Flaubert lui-même a clairement souligné que ses personnages étaient totalement inventés et donc ses créatures personnelles. Cette dualité fournit à chaque lecteur sa perceptio du roman.
Le romantisme est le ressort de l’héroïne et du livre, à la source des émotions et de la beauté du personnage. La fin désespérante reste d’une justesse implacable et vient éprouver les sentiments du lecteur. Une œuvre fondatrice tendue par la plume la plus précise jamais tenue.
