Cent ans de solitude
Difficulté ***
Profondeur ***
Originalité ****
Emotions ****
Très connu (vendu à plus de 30 millions d’exemplaires), récompensé, « 100 ans de solitude » a largement contribué au prix Nobel de littérature de son auteur. Ce roman est considéré comme le chef d’œuvre du réalisme magique. Car le fantastique imprègne l’œuvre, notamment dans la mort des personnages (et surtout après), les prédictions fatales, la fertilité magique ou les phénomènes climatiques uniques. Mais la folie humaine surpasse par son outrance et sa dramatique tous ces écarts au réalisme : obsessions éternelles, sens du sacrifice absolu, rancoeurs infernales, joies échevelées, pureté divine, massacres atroces …
La plume unique de Marquez, enlevée et dynamique, sert parfaitement un texte entre hystérie, féérie et dramaturgie. A travers la famille Buendia, il dépeint la comédie humaine avec un rythme et une force frénétiques : guerres, politique, commerce, magie, amour, sexe, argent, religion, fêtes, modernité, mort, maladies, fléaux… La richesse d’un texte qui n’a pas le temps de dialoguer enivre et noie à la fois : les Auréliano et les José Arcadio se succèdent ainsi sur un siècle dans un tourbillon d’homonymes.
L’interprétation habituelle du titre n’est pas satisfaisante : certains personnages sont seuls, surtout l’âge venant, mais on ne peut pas dire que cela définisse leur existence ou l’atmosphère du roman. Au contraire le roman grouille de vie : animale, sexuelle, florale, … Les morts et le climat eux-mêmes refusent leur statut inerte ou cyclique : l’esprit des uns reste sur terre bien après leur disparition, l’autre ignore les saisons et la raison. Aussi l’antiphrase est sûrement la meilleure interprétation du titre : le village de Macondo, terre oubliée et inaccessible, n’aura qu’un siècle de vie avant de s’éteindre avec le dernier des Buendia.
« 100 ans de solitude » m’a envoûté : incapable de lire plus de quinze pages par jour sur la majorité du parcours, j’ai cependant adoré cette oeuvre. La densité de chaque page était telle en termes de poésie, de personnages et d’événements, que je devais ingérer son contenu longuement avant de reprendre ma lecture. L’effort en vaut la peine : rarement livre vous emmènera aussi loin dans les méandres de la psychologie humaine, des liens familiaux et de la déraison.
Un livre colosse, symbole de la culture et de la folie sud-américaine.