
La lettre écarlate
Difficulté **
Profondeur ****
Originalité ***
Emotions ****
Le premier best seller américain mérite sa place ici : empli d’une atmosphère médiévale rare de l’autre côté de l’Atlantique, Hawthorne montre la force et la beauté des femmes comme peu d’écrivains l’ont jamais fait.
Il développe ainsi un texte historique d’une grande modernité. Ce récit dur et émouvant est animé par une plume classique d’un niveau très élevé, qui résonne d’une musicalité ancienne, source de l’étrange magie qui envahit le lecteur. Cette sensation mystique crédibilise inconsciemment la possibilité de la sorcellerie.
Mais en fait la douceur et la résilience de l’héroïne, certes animées d’une forme de culpabilité, en font un personnage christique aux antipodes de la Sataniste ostracisée par les siens. Ce paradoxe de la sainte sorcière, évident pour les mécréants, est ici brillamment démontré. Ses relations avec les autres personnages définissent d’ailleurs ces derniers, tant sa bienveillance infinie les met à nu, tel un jugement divin. Et sa perfection est aussi sa malédiction : personne ne peut soutenir un tel niveau de sainteté, qui engendre finalement jalousie et mépris.
Ainsi Hawthorne assure, à travers le récit classique de la bigoterie misogyne, une réflexion subtile sur la psychologie humaine et le fonctionnement des groupes sociaux. La description de cette société pieuse et fermée souligne la nécessité morale impérieuse d’un monde ouvert et transparent : la bonté individuelle ne trouve guère sa place quand les puissants refusent de faire miséricorde.
Un conte réaliste et étrangement moderne, chaînon entre la littérature américaine naturaliste et le médiévisme européen.