Les voyages de Gulliver
Difficulté **
Profondeur ***
Originalité ****
Emotions **
« Les voyages de Gulliver « souffrent du même mal qu’ »Alice au pays des merveilles » ou « le petit prince » : l’appartenance à la catégorie conte pour enfants. Cela induit un certain dédain pour des œuvres majeures et bien plus profondes que les jeunes lecteurs ne le comprennent. Le livre de Swift subit un deuxième drame : les autres histoires de son héros sont éclipsées par Lilliput, alors que ces récits sont plus philosophiques et étranges que le conte le plus connu. Et de fait peu de gens lisent vraiment ces voyages, dont la qualité littéraire a pourtant établi la célébrité.
Car ces histoires fantastiques publiées en 1726 ouvrent la voie à un genre majeur que développeront d’abord les compatriotes de Swift : Poe, Shelley, Stoker, Stevenson … La plume technique et classique de l’écrivain a ainsi crédibilisé son univers satirique, à une époque peu encline à l’imaginaire et son succès a assuré la pérennité du genre.
Chaque voyage est une réflexion sur l’altérité et l’exercice du pouvoir par la force. A travers elle, Swift interpelle le lecteur sur les dérives de la monarchie et de la religion (ce qui lui a valu la censure comme Gogol ou Soljenitsyne après lui), amenant un autre niveau de lecture.
« Les aventures de Gulliver » incarnent l’aube du fantastique mais développent également une éthique de la différence d’une modernité étonnante, ce qui en fait une œuvre fondatrice.